jeudi 7 mai 2009

Le Surréalisme et la Poésie

"L'au-delà, tout l'au-delà est dans cette vie."
André Breton

Le mot « surréalisme » a été choisi en hommage à Apollinaire.

C'est dans son premier Manifeste que Breton en propose la définition : Surréalisme, n. m. Automatisme psychique pur par lequel on se propose d'exprimer, soit verbalement, soit par écrit, soit de toute autre manière, le fonctionnement réel de la pensée.

Dictée de la pensée, en l'absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préoccupation esthétique ou morale. En fait, le surréalisme dépasse très largement cette définition de l'écriture automatique.

C'est dans la vie que le surréalisme devait trouver son territoire en promouvant un nouveau regard sur les objets et sur les mots, qu'il a débarrassés de leur utilitarisme. Veillant à ne laisser échapper aucune association mentale digne de contribuer à la libération de l'esprit, il a fourni aussi le modèle durable d'une insurrection générale contre tous les mots d'ordre de la société bourgeoise.

André Breton

  • Manifestes surréalistes (1924, 1929)
  • Clair de Terre (1923)

Louis d'Aragon

  • le Libertinage (1924)
La belle comtesse
montre sa vieille cuisse
ses entrailles cuisent
les nuées son rond ventre éventail
défie le soleil rond Les poils de ses aisselles
se collent aux cils des chérubins L’orteil de son homme
transperce l’arbre fleuri
vérole du potager un oiseau se pose sur le nez de son homme
et fait descendre la lune la lune se pose sur le cul de son homme
et tombe amoureuse de l’arc-en-ciel l’arc-en-ciel s’enferme dans le cercueil et le cercueil dit à l’écureuil merdre! Veux tu finir"
Poème de Joan Miró, novembre 1936, cité in Joan Miró, Fondation Pierre Gianadda, Martigny, 1997, p.14

Le Verbe Être
Je connais le désespoir dans ses grandes lignes. Le désespoir n'a pas d'ailes, il ne se tient pas nécessairement à une table desservie sur une terrasse, le soir, au bord de la mer. C'est le désespoir et ce n'est pas le retour d'une quantité de petits faits comme des graines qui quittent à la nuit tombante un sillon pour un autre. Ce n'est pas la mousse sur une pierre ou le verre à boire. C'est un bateau criblé de neige, si vous voulez, comme les oiseaux qui tombent et leur sang n'a pas la moindre épaisseur. Je connais le désespoir dans ses grandes lignes. Une forme très petite, délimitée par un bijou de cheveux. C'est le désespoir. Un collier de perles pour lequel on ne saurait trouver de fermoir et dont l'existence ne tient pas même à un fil, voilà le désespoir. Le reste, nous n'en parlons pas. Nous n'avons pas fini de désespérer, si nous commençons. Moi je désespère de l'abat-jour vers quatre heures, je désespère de l'éventail vers minuit, je désespère de la cigarette des condamnés. Je connais le désespoir dans ses grandes lignes. Le désespoir n'a pas de coeur, la main reste toujours au désespoir hors d'haleine, au désespoir dont les glaces ne nous disent jamais s'il est mort. Je vis de ce désespoir qui m'enchante. J'aime cette mouche bleue qui vole dans le ciel à l'heure où les étoiles chantonnent. Je connais dans ses grandes lignes le désespoir aux longs étonnements grêles, le désespoir de la fierté, le désespoir de la colère. Je me lève chaque jour comme tout le monde et je détends les bras sur un papier à fleurs, je ne me souviens de rien, et c'est toujours avec désespoir que je découvre les beaux arbres déracinés de la nuit. L'air de la chambre est beau comme des baguettes de tambour. Il fait un temps de temps. Je connais le désespoir dans ses grandes lignes. C'est comme le vent du rideau qui me tend la perche. A-t-on idée d'un désespoir pareil! Au feu! Ah! ils vont encore venir... Et les annonces de journal, et les réclames lumineuses le long du canal. Tas de sable, espèce de tas de sable! Dans ses grandes lignes le désespoir n'a pas d'importance. C'est une corvée d'arbres qui va encore faire une forêt, c'est une corvée d'étoiles qui va encore faire un jour de moins, c'est une corvée de jours de moins qui va encore faire ma vie.
André BretonExtrait de"Le révolver à cheveux blanc"Poésie/Gallimard.

1 commentaire:

webmaster moreeuw a dit…

Pour infos cette oeuvre s'intitule Pasteur découvrant le surréalisme. C'est 1 encre et aquarelle sur papier de 1986 par Francis Moreeuw.
a+ et bonne continuation